Mais avant de faire le lien entre la haine et la vérité, il convient de définir une notion aussi subjective que la haine. Qu'entend-on par haine sur Internet ? Est-ce la haine de celui qui la professe, ou la haine de celui qui l'entend ? En quoi le fait d'exprimer sa haine aurait la faculté de nous rendre violent, donc dangereux pour la paix sociale ? Pourquoi la haine devrait-elle se diffuser comme une sorte de virus, dès qu'elle est exposée sur Internet ?
La subjectivité de la haine
La haine est un sentiment naturel, tout comme la colère, la tristesse ou la joie. S'il est naturel, cela signifie que la nature l'a retenu comme émotion utile du point de vue de l'évolution darwinienne. La haine se distingue de la colère par sa longue intériorisation, à l'inverse du caractère spontané de la colère. Mais haine et colère semblent avoir la même utilité évolutive : la défense contre un agresseur, ou plus prosaïquement la conquête de nouveaux biens vitaux.
Bien sûr, nous ne sommes plus à l'âge des cavernes où la survie était conditionnée par l'accès concurrentiel à la nourriture. A l'époque de la technologie nucléaire, il serait dangereux de laisser s'exprimer nos instincts de conquête, même s'ils sont naturels. La sagesse et la religion viennent étouffer ou canaliser nos émotions naturelles vers des objectifs compatibles avec le bien commun. D'ailleurs la chute de la religion demeure problématique, car plus aucun frein moral ne semble s'opposer à la jouissance et à la conquête des biens terrestres. Nous l'avons expérimenté tragiquement avec les différents totalitarismes athées, mais cette question demeure toujours d'actualité.
Une loi fondée sur la séparation entre le Bien et le Mal
Pourtant cette loi relève d'une dimension religieuse, car contredisant la nature et reposant sur une séparation nette entre le Bien et le Mal. Cette loi ne cherche pas à canaliser les sentiments de haine pour qu'elles demeurent compatibles avec le bien social, par exemple le désir de rivalité ou la mobilisation des énergies contre un ennemi commun, mais à l'écraser complètement comme l'expression du diable. La haine serait diabolique, la tolérance angélique.
Cette résolution manichéenne ne sera jamais efficace, mais précisément l'exhortation au Bien a besoin de la dénonciation du Mal pour exister. Ce gouvernement l'a très bien compris en ne luttant pas efficacement contre les causes sociétales de la haine, comme les inégalités sociales, la délinquance, l'islamisation et l'immigration illégale, pour pouvoir ensuite dénoncer la haine supposée de ceux qui dénoncent ces fléaux.
Mais en voulant étouffer vainement la haine, ce gouvernement étouffe la liberté d'expression, et donc potentiellement l'exposition à la connaissance du public des faits réels susceptibles d'attiser les tensions. En cela, l'élimination de la haine peut agir contre la vérité.
L'exemple des viols pakistanais en Angleterre
Prenons l'exemple de faits divers sordides dont l'exposition publique a été étouffée, afin de ne pas susciter des sentiments de haine. En particulier, l'affaire de viols et meurtres commis par des maffias pakistanaises en Angleterre contre de jeunes anglaises. Cette affaire a été apportée à la connaissance du public à travers les réseaux sociaux, non sans sentiment partagé de haine et de colère qui sont parfaitement compréhensibles, eu égard à l'atrocité du crime.
Mais le gouvernement, sentant que cette affaire remettait en question l'injonction multi-culturaliste, condamna à 13 mois de prison l'activiste Tommy Robinson dont le crime était de vouloir apporter à la connaissance du public le contenu du procès de ces criminels. Dans ce cas précis, la recherche de la vérité fut étouffée par la lutte contre la haine. Cette haine n'était d'ailleurs pas nécessairement dirigée contre toute la communauté pakistanaise, mais contre tous ceux qui ont tendance à trouver des excuses aux criminels pourvu qu'ils soient pauvres ou étrangers, ainsi le gouvernement, la police, les associations dites humanitaires. Sans cette haine, il est possible que les faits n'aient jamais été apportés à la connaissance du public, exposant encore des dizaines de victimes innocentes à une prédation qui témoigne de moeurs barbares.
L'exposition de la vérité sur ces crimes a-t-elle provoqué une augmentation de la haine contre la communauté pakistanaise en général ? Oui probablement, tout comme l'enseignement de l'esclavage en Afrique ou de la colonisation en Algérie peut attiser la haine des jeunes africains ou algériens contre l'Occident en général.
Faudrait-il pour autant censurer toute vérité dérangeante, au motif qu'elle remettrait en question le fantasme d'un monde aseptisé, peuplée de créatures angéliques ? Bien sûr que non, et le gouvernement anglais a commis une faute impardonnable en voulant étouffant cette affaire. Mais par son cynisme, le gouvernement a démontré que la vérité et la haine sont parfois intimement liées, pour le meilleur comme pour le pire.
La vérité incite plus à la haine que le mensonge
La loi contre la haine sur Internet semble réprimer les faits mensongers, et non les faits véridiques susceptibles d'attiser la haine. Mais nous venons de démontrer que seuls les faits véridiques produisent de la haine, et aucune façon les faits mensongers s'ils sont déconstruits dans le cadre d'un débat contradictoire.
Par exemple, si j'affirme que « les Auvergnats sont des voleurs », le ridicule d'une telle assertion ne produira aucune haine, mais un sourire moqueur.
Par contre, si je m'aventure à dire que les personnes issues d'un sympathique pays coincé entre le Moldavie et la Bulgarie sont des voleurs, connaissant la nationalité de certains mendiants dans le métro, une telle assertion fondée sur des faits réels pourrait produire de la haine ou de l'hostilité contre une communauté bien urticante.
Donc, plus une proposition factuelle semble crédible, plus elle produit de la haine, et plus elle semble ridicule, plus elle produit du rire.
Les partisans du vivre-ensemble feraient donc mieux de ridiculiser les propositions jugées discriminatoires, plutôt que de vouloir les éliminer à travers une loi forcément suspecte. Mais peut-être que leur impuissance explique l'émergence d'une telle loi visant à forcer les consciences, car les propositions discriminatoires révèlent souvent une part de vérité qu'il est impossible de nier.
Or c'est justement le débat libre et contradictoire qui pourrait révéler cette part de vérité, dépassant ainsi la haine qui sanctionne la simple connaissance des faits.
Le débat au-delà de la haine
Dans l'affaire des viols pakistanais, beaucoup de personnes censées estiment qu'il ne s'agit pas d'un hasard, et que ces crimes révèlent en réalité les préjugés machistes et sexuels de nombreux musulmans. Contrairement à une croyance répandue, les recherches de mots obscènes sur Google n'émanent pas majoritairement de pays occidentaux, mais de pays musulmans ou rétrogrades, le Pakistan arrivant largement en tête des recherches coquines. Les viols à Cologne et les harcèlements de rue Porte de la Chapelle traduisent cette même frustration sexuelle émanant de certains jeunes mâles musulmans qui pensent qu'une femme en jupe est une proie consentante pour être violée, car sinon elle serait voilée. Entre viol et voile, il n'y a qu'un millimètre de tissu.
Or cette croyance machiste et primaire procède de la religion musulmane qu'il serait légitime d'interroger, dans le cadre d'un débat contradictoire. Ce débat contradictoire n'incite pas forcément à la haine contre les musulmans en tant que personnes, car beaucoup de musulmans éclairés souhaitent une modernisation de leur religion sur le modèle d'un dieu d'amour compatible avec l'esprit de tolérance de nos sociétés. Brusquer l'islam sur ce sujet sensible permettrait de développer un islam spirituel et moderne contre l'islam sociétal et archaïque provenant d'Arabie saoudite.
Nous le constatons, la révélation de faits factuels, parfois accompagnés de colère ou de haine, peut produire les conditions d'un débat qui, s'il est accepté par tous, pourrait favoriser l'émancipation des individus et la paix sociale.
Une différence de traitement entre les religions
Mais l'évocation de ce lien de cause à effet, entre un crime sordide et un système de pensée laïc ou religieux, ne semble pas concerner toutes les communautés, selon les journalistes du Monde ou de Libération.
Ces journalistes utilisent par exemple les crimes pédophiles de certains prêtres pour dénoncer la position de l'Eglise concernant la place des femmes ou la sexualité, parfois à juste titre. Mais aux yeux de ces journalises, aucun lien de cause à effet ne semble être établi entre les viols pakistanais et la position de l'Islam concernant la femme, alors que le phénomène présente des ressemblances certaines avec les scandales de l'Eglise.
Cette différence de traitement, favorable aux musulmans, défavorables aux catholiques, prouve une nouvelle fois que le Monde ou Libération sont des journaux de gauche? Mais après tout, le principe même du débat démocratique consiste à laisser s'exprimer tous les points de vue, mêmes les plus partiaux, pourvu naturellement que les contradicteurs aient droit de cité.
Or cette liberté d'expression accordée à tous n'est qu'une façade antidémocratique, car si la gauche intellectuelle a toujours le droit de s'exprimer parfois même en relativisant les crimes issus de son sein, l'arsenal juridique entourant la liberté d'expression penche dangereusement vers une pénalisation de l'opinion jugée conservatrice ou identitaire, celle qui dénonce l'avortement, l'islamisation, l'immigration. Il existe bien une différence de traitement en fonction du système de valeurs sous-jacent aux idées, indépendamment de la véracité des faits.
L'Empire du Bien
Cette loi contre l'incitation à la haine constitue une étape, parmi bien d'autres, pour transformer une société démocratique en système totalitaire fondée sur la jouissance matérielle et l'édulcoration de nos instincts de survie. « Panem et Circenses », telle était la devise des empereurs romains qui acceptaient toutes les déviances, toutes les orgies, pourvu qu'elles ne remettaient pas en cause leur pouvoir personnel.
Avec cette loi, nous sommes fortement incités à nous déposséder de notre intelligence, même mal employée, pour nous conduire en consommateurs repus et dociles face aux bouleversements sociétaux souhaités par de puissants lobbies industriels ou financiers. Il faut régenter la vérité, la contrôler, la plier contre l'évidence des faits, d'où la récente loi sur les fake news. Et s'il existe des récalcitrants, ce n'est pas grave, le changement de population en cours écrasera numériquement les citoyens rebelles sous une masse allogène jugée à tort plus reconnaissante. Car après la déconstruction des vertus républicaines, viendra le temps de la barbarie, puis l'effondrement de l'Empire du Bien.
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