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Une Europe des cercles concentriques

Le reniement des racines civilisationnelles de l'Europe conduit au recul toujours plus lointain de ses frontières géographiques et morales, au risque de dissoudre l'identité européenne dans le grand chaudron du multiculturalisme. Paroxysme d'un élargissement menaçant de noyer l'Europe sous l'Asie, l'intégration de la Turquie signifie la censure de notre héritage chrétien, l'adhésion prochaine des peuples  d'Asie centrale, l'exposition directe à la poudrière du Proche-Orient.

L'élargissement  débouche sur la crise européenne

Même en mettant entre parenthèses la question turque, l'élargissement européen rend impossible l'émergence d'un consensus entre pays ne partageant pas les mêmes intérêts. Certes la majorité qualifiée est précisément destinée à combattre la cacophonie et l'immobilisme produit par la multiplication des Etats, mais cet instrument discutable concède un poids encore excessivement élevé aux petits pays d'Europe de l'est qui pratiquent un dumping social tout en abusant de la générosité des pays fondateurs.

Bien que motivé par le souci compréhensible d'accueillir des peuples ayant souffert du communisme, l'élargissement demeure une raison essentielle à l'échec européen. Jouant plus facilement sur les divergences entre Etats, la Commission européenne acquiert une influence prépondérante, imposant sa vision libérale et technocratique aux peuples dépossédés de leur souveraineté. La dispersion de la zone euro conduit à la perte de compétitivité des pays du sud piégés par une monnaie trop forte. L'espace Schengen aboutit à un déséquilibre démographique entre un Nord-Ouest attractif et un pourtour méditerranéen que fuie la jeunesse. La folie de Schengen facilite une immigration massive extra-européenne, puisque les Etats méditerranéens continuent d'accueillir des bateaux entiers de clandestins sans les refouler sévèrement.  

Quel c?ur pour l'Europe ?  

La diversité européenne est potentiellement une richesse, pourvu qu'une organisation raisonnable sache la gérer avec pragmatisme. L'exemple de l'immigration montre que plusieurs niveaux de défense s'avèrent nécessaires pour encaisser le choc brutal d'une mondialisation impitoyable. Autour d'un c?ur européen à forte identité, une Europe des cercles concentriques permettrait de garantir la solidarité européenne tout en respectant les particularités nationales. 

Le c?ur de l'Europe suppose des peuples partageant une même proximité culturelle. Le ZollVerein de Bismarck fut une réussite car réunissant des pays de langue et de populations allemandes. Le problème fondamental de l'Europe réside dans sa double fracture : selon une opposition nord-sud entre le monde germanique et le monde latin, laquelle recouvre partiellement les mondes protestants et catholiques, selon une opposition ouest-est entre les Etats nations millénaires (France, Angleterre, Espagne) et les nouveaux pays issus de la décomposition des empires russes ou austro-hongrois. Ces distinctions expliquent le rapport différencié des peuples au travail, à l'autorité, à l'Etat. 

La difficulté de l'axe franco-allemand
 
Dans ces conditions, l'axe franco-allemand pourrait-il constituer le c?ur européen ? La faible inclinaison des collégiens français à apprendre l'allemand, bien après l'espagnol, montre l'indifférence des nouvelles générations envers l'Allemagne. L'autoflagellation des allemands pour leur passé nazi contribue au manque d'entrain pour une civilisation allemande perçue comme mortifère voire criminelle. A force de se détester soi-même, les allemands suscitent un enthousiasme refroidi pour leur culture. Pour que l'axe franco-allemand puisse servir d'ossature au projet européen, un double effort de rapprochement s'avère essentiel : d'une part que la France renonce à son universalisme qui empêche précisément toute définition restrictive de la civilisation européenne. D'autre part que l'Allemagne retrouve la fierté normale d'une nation puisant ses racines dans des siècles d'histoire.

Le c?ur européen : union fiscale, sociale, monétaire et diplomatique

Une fois ces conditions réunies, et pourvu que la France et l'Allemagne se redressent économiquement et démographiquement, il serait possible d'envisager l'unité fiscale et sociale, ainsi que le partage d'une monnaie unique entre pays bénéficiant de la même compétitivité. La politique industrielle bénéficierait d'un effet de levier considérable, ainsi que d'une diplomatie commune. Ce c?ur européen comprendrait également la Belgique, les Pays-Bas, l'Autriche et les pays scandinaves. Un parlement européen resserré à 300 parlementaires serait compétent pour prendre l'initiative des lois dans le domaine de compétences de l'union : la politique économique, sociale et diplomatique. Le déplacement de certaines institutions à Aix-la-Chapelle, par exemple le ministère européen des Affaires étrangères, rappellerait l'ancrage historique de l'Europe, à cheval entre le monde germanique et latin.

Un second cercle de pays européens ambivalents


Le second cercle correspond à un ensemble de pays assurément européens mais dont l'ambivalence avec le monde extérieur empêche de rejoindre le c?ur continental. Cette ambivalence procède soit d'un héritage colonial comme l'Espagne, soit d'un rayonnement international encore vivace comme l'Angleterre, soit d'un déséquilibre interne comme l'Italie dont le sud demeure fortement empreint de mentalité méditerranéenne. L'honnêteté consiste à désigner également la France comme trop impliquée dans ses affinités africaines pour figurer dans le premier cercle, comme l'illustre le projet euro-méditerranéen soutenu par Sarkozy. Toutefois, un c?ur européen réduit à l'Allemagne serait problématique, justifiant la participation française au c?ur de l'Europe.

Ces pays ambivalents ne pourraient bénéficier de l'absolue liberté de circulation des biens et personnes, puisqu'ils constituent une porte ouverte à l'emprise extérieure, ainsi les intérêts américains envahissant la place londonienne. Leur implication dans le processus de décision est à exclure pour les mêmes raisons, mais ils peuvent figurer en tant qu'observateurs dans les institutions de l'Union.   

Un troisième cercle de pays européens solidaires

Le troisième cercle représente l'ensemble des pays européens n'ayant pas vocation à intégrer l'union européenne, mais dont la proximité culturelle justifie une solidarité renforcée. Les pays slaves ou orthodoxes appartiennent à cette catégorie, Grèce comprise. Bien entendu ces pays ne peuvent rejoindre l'espace Schengen réservé au c?ur européen, mais peuvent adhérer au programme Erasmus destiné à favoriser la compréhension mutuelle entre les futures générations. Comme les pays ambivalents, ils bénéficieraient des accords de recherche européens, ainsi que d'une protection militaire européenne, en remplacement de l'OTAN. 

L'Europe technologique et militaire, c?ur de sa future puissance


Le désengagement de l'OTAN conditionne l'indépendance de l'Europe actuellement soumise au mondialisme imposé par les Etats-Unis. Le devoir des puissances continentales, en particulier la France et l'Allemagne, consiste à développer une organisation militaire suffisamment puissante pour convaincre les pays européens de s'adosser à son système défensif, permettant ainsi le renforcement de son influence stratégique. Actuellement chaque européen dépense trois fois moins pour son armée que chaque citoyen américain, il suffirait donc d'augmenter drastiquement les budgets militaires pour doter l'Europe d'une défense moderne, à forte composante spatiale et aéronautique. Calquée sur l'OTAN, une nouvelle organisation européenne coordonnerait les armées existantes sans effacer leur identité. La recherche européenne trouverait dans les besoins militaires une source de croissance importante, multipliant les brevets et les révolutions technologiques à destination du civil.

Si l'Europe libérale signifie l'impuissance européenne, une Europe des cercles concentriques autour d'un noyau identitaire solide permet de conjuguer efficacité et solidarité. Pourvu que les nations européennes prennent conscience des menaces extérieures, elles peuvent se coordonner pour garantir leur sécurité et leur prospérité. Mais cet intérêt européen n'enlève en rien la nécessité d'un redressement national dans chaque pays, à commencer par la France et l'Allemagne.

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